Confiance : comment raviver les « esprits animaux » ?

Après avoir gagné les entreprises, les ménages et les investisseurs en 2021, la confiance s’est peu à peu effritée en 2022 avec l’apparition de plusieurs chocs successifs.

Les philosophes du 16ème siècle caractérisaient les « esprits animaux » comme la force vitale qui nous anime. Pour John Maynard Keynes, ces derniers ont trait à la psychologie, et traduisent la domination de l’instinct (à certains moments) sur l’aspect rationnel des individus. Dans leur livre, Robert Shiller et George Akerlof recensent plusieurs « esprits animaux ». Parmi eux, on retrouve la confiance qui agit – sur les marchés financiers et dans l’économie – comme un « multiplicateur » qui amplifie le comportement des agents économiques. Les auteurs prennent la crise de 2008 en exemple afin d’illustrer une crise de confiance. A contrario, on peut citer l’année 2021 comme celle qui renoua avec la confiance, grâce aux interventions budgétaires et monétaires, à la fin des confinements et aux vaccins.

Pour mesurer la confiance du secteur privé, il est d’usage de se référer aux enquêtes soumises aux entreprises, considérées comme des indicateurs avancés de la santé de l’économie. Elles comportent des questions liées à l’état du carnet de commandes ou encore aux ambitions des firmes en matière d’embauche…

Par ce prisme, une décélération marquée s’observe au niveau mondial, et concerne de manière isolée ou concomitante le secteur manufacturier, celui des services ou encore de l’immobilier. Notons que les données en zone Euro et en Chine sont particulièrement moroses, tandis que les Etats-Unis sont ,en relatif, plus résilients.

Les enquêtes dédiées aux ménages dépeignent quant à elles un panorama sans équivoque : le moral du consommateur est au plus bas ! C’est notamment le cas des enquêtes allouant un poids supérieur à la problématique de l’inflation, à l’instar de celle fournie par l’Université du Michigan pour les Etats-Unis. Le rebond modéré de cette dernière en septembre, publié vendredi dernier, ne doit pas occulter la multitude de chocs auxquels font face les consommateurs du monde entier; comme l’accélération de l’inflation, la guerre, l’accroissement du prix des matières premières ou encore l’augmentation des risques politiques…

Les statistiques liées à la confiance des investisseurs ne sont guère plus encourageantes. Les sondages publiés par l’American Association of Individual Investors (AAII) montrent par exemple que les particuliers américains ont un sentiment majoritairement baissier concernant l’investissement actions à horizon 6 mois. Pour ce qui est des investisseurs professionnels, l’enquête de la BofA Merrill Lynch – qui interroge un panel de gérants de fonds internationaux – suggère là aussi un ressenti négatif.

Peu importe les mesures de confiance considérées, l’ambiance est au pessimisme. Dès lors, quels catalyseurs seraient susceptibles de raviver les « esprits animaux » ?

Pour les investisseurs, le point de bascule pourrait se situer à la conjonction de plusieurs éléments. L’identification d’un véritable pic d’inflation aux Etats-Unis reste primordiale. A +6,6 % sur un an en septembre, l’inflation « cœur » a encore surpris à la hausse la semaine passée (+6,5 % attendu). La dynamique de celle-ci conditionnera l’évolution du ton de la Fed, in fine celle du taux terminal, et de manière plus générale l’atteinte du point d’acmé sur le cycle de resserrement monétaire mondial. La saison des résultats qui s’ouvre à peine aux Etats-Unis pourrait réserver son lot de surprises positives, de même que les données d’activité en augmentant la probabilité d’un « atterrissage en douceur ». Un hiver plus « doux » en Europe apaiserait par ailleurs les craintes énergétiques. Enfin, la guerre en Ukraine, pour laquelle un maigre espoir de reprise des négociations demeure.

Avant que les choses ne s’améliorent franchement et que les bonnes nouvelles deviennent de bonnes nouvelles, les investisseurs devraient transiter entre « bad news is good news » et « good news is bad news ».

Les « esprits animaux » ne sont pas encore tout à fait éteints.

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