Francis Idehen, Goldman Sachs AM: « Les investisseurs ne veulent pas commettre les mêmes erreurs qu’en 2001 ou 2008 en se retirant des marchés alternatifs, pour ensuite devoir combler les lacunes de leurs portefeuilles »

Les marchés secondaires, la dette privée et les infrastructures sont considérés comme les meilleures opportunités de croissance, selon une enquête de Goldman Sachs Private Markets.


Une nouvelle enquête de Goldman Sachs Private Markets, réalisée entre juin et juillet 2023 auprès de plus de 200 investisseurs (LPs) et sociétés de gestion (GPs), sur l’ensemble des stratégies non cotées, révèle un optimisme croissant en ce qui concerne les opportunités d’investissement par rapport à l’année dernière: 64% estiment que les conditions d’investissement se sont améliorées, 22% qu’elles se stabilisent. Malgré les inquiétudes généralisées autour de la question de la «surexposition», une part plus importante des LPs interrogés est sous-exposée aux investissements alternatifs.

L’enquête de Goldman Sachs a porté sur des sujets tels que la géopolitique et l’environnement macroéconomique, les préférences en matière d’allocation sectorielle et stratégique, et la perception des levées de fonds. Les GPs et les LPs ont, de la même façon, exprimé le souhait que les LPs établissent des relations plus approfondies avec un nombre plus restreint de GPs. À noter également:

  • En dehors de l’investissement, le principal défi des GPs est de lever des fonds, un sujet devenu plus épineux.
  • Les LPs estiment que le «track record» est l’élément le plus important dans l’évaluation des GPs, ce qui complique la tâche aux nouveaux GPs.

«Contrairement aux craintes de ‘surexposition’ et dans un contexte de risques plus importants, notre enquête démontre que non seulement de nombreux LPs sont sous-exposés à la plupart des stratégies, mais aussi que la plupart d’entre eux sont, en réalité, en train d’augmenter leurs allocations», déclare Francis Idehen, associé et responsable américain des solutions multi-stratégies alternatives chez Goldman Sachs Asset Management. «Pourtant, même s’ils retrouvent une activité d’investissement plus normale qu’en 2022, les LPs déclarent vouloir des relations plus approfondies avec leurs GPs, avec des engagements moins nombreux et plus d’activités de co-investissement.»

Les risques perçus sont centrés sur les préoccupations macroéconomiques, et non sur les facteurs de marché. Les personnes interrogées pouvaient sélectionner plusieurs risques et ceux qui sont le plus revenus sont les suivants:

  • Récession économique – 48%
  • Conflits géopolitiques – 46%
  • Inflation – 43%
  • Taux d’intérêt – 37%

En ce qui concerne les craintes de récession, 77% des personnes interrogées s’attendent à une récession aux États-Unis au cours des deux prochaines années; 23% d’entre elles pensent qu’elle aura lieu en 2023 et 53% en 2024. Les anticipations de la zone euro sont plus pessimistes: 90% des personnes interrogées s’attendent à une récession, dont 42% en 2023 et 44% en 2024.

Les perspectives en matière de taux et d’inflation diffèrent également selon les régions. Aux États-Unis, 49% des personnes interrogées s’attendent à une hausse des taux, tandis que 45% estiment que les taux resteront stables. Ces opinions s’inversent au niveau mondial: 51% des personnes interrogées s’attendent à ce que les taux restent stables d’ici fin 2023, tandis que 40% anticipent une hausse des taux. Dans la zone euro, 63% des personnes interrogées s’attendent à une hausse des taux.

«Même avec une inflation plus élevée et des craintes de récession, les LPs que nous avons interrogés sont pour la plupart des investisseurs expérimentés qui reconnaissent l’importance de rester constamment investis dans le non-coté», poursuit Francis Idehen. «Ils ne veulent pas commettre les mêmes erreurs qu’en 2001 ou 2008 en se retirant des marchés alternatifs, pour ensuite devoir combler les lacunes de leurs portefeuilles. Les investisseurs veulent maintenir le cap, avec l’aide d’une gestion active solide.»


Les allocations aujourd’hui et dans 2/3 ans

Parmi les huit principales classes d’actifs, les répondants ont indiqué que leurs allocations moyennes les plus importantes étaient les suivantes:

  • Buyouts – 12,2%
  • Dette privée – 10,1%
  • Immobilier – 9,6%
  • Infrastructure – 6,4%
  • Growth – 5,1%
  • Secondaires – 5,1%
  • Venture – 3,9%
  • Opportuniste/ distress – 2,6%

Les LPs déclarent être beaucoup plus susceptibles d’être sous-exposés aux stratégies de private equity que d’y être surexposés. Les domaines auxquels ils sont les plus sous-exposés sont les suivants:

  • Co-investissements – 51%
  • Opportunistes/distress – 46%
  • Infrastructure – 44%
  • Venture – 41%

Les buyouts font exception, 27% d’entre eux y étant surexposés, contre 26% sous-exposés.

«Les LPs restent les plus sous-exposés aux stratégies qui offrent des points d’accès différenciés aux marchés non cotés, en particulier en ce qui concerne les allocations au secondaire, aux stratégies opportunistes et aux infrastructures», a déclaré Francis Idehen. «Ce sont eux qui sont les plus intéressés par les opportunités de co-investissement, reflétant ainsi leur désir croissant d’établir des relations plus approfondies avec un nombre de GPs privilégiés plus restreint.»

Alors que 58% des LPs ne déclarent aucune allocation aux co-investissements, 59% d’entre eux prévoient d’y augmenter leurs allocations au cours des deux ou trois prochaines années; viennent ensuite les fonds secondaires (48%), suivis par la dette privée (46%), le venture (41%), les infrastructures (40%) et les stratégies opportunistes/distress (40%).

«L’exposition accrue des LPs aux investissements secondaires et aux co-investissements, un mouvement progressif qui s’est étendu sur une décennie ou plus, est une évolution naturelle des marchés privés», a déclaré Michael Brandmeyer, associé et co-responsable du Goldman Sachs Asset Management External Investment Group (XIG). «Un nombre croissant de LPs sophistiqués dispose désormais des ressources et de l’expertise nécessaires pour accéder à ces stratégies dans le cadre de leurs allocations ‘core’.»

«Alors que l’inflation est un facteur clé pour les allocations d’infrastructure de nombreux investisseurs, la stratégie bénéficie de tendances structurelles positives qui soutiennent des perspectives haussières à long terme, notamment la numérisation de nos économies et la transition vers des sources d’énergie renouvelables», a ajouté Scott Lebovitz, associé et co-CIO infrastructures chez Goldman Sachs.

Les LPs souhaitent diminuer leurs allocations à l’immobilier en premier lieu (28%), suivi par les stratégies de growth (16%) et de buyouts (15%).

«Alors que la réévaluation des prix des actifs immobiliers est en cours et que plus de 2 000 milliards de dollars d’échéances au cours des trois prochaines années vont probablement imposer de nouvelles réévaluations, il n’est pas surprenant que certains investisseurs restent prudents quant à leurs allocations immobilières», a déclaré Jim Garman, associé et responsable mondial de l’immobilier chez Goldman Sachs. «Nous nous attendons à d’autres bouleversements au fur et à mesure que le marché s’adapte à cette nouvelle réalité économique. Cette situation offrira des opportunités aux GPs qui peuvent accéder à des actifs dans des domaines portés par l’innovation technologique, l’évolution démographique et le développement durable, et qui ont l’expertise pour bien les exploiter.»

«Lorsque la grande majorité des LPs de notre enquête estime que le private equity et l’immobilier sont surévalués, il n’est pas surprenant qu’ils deviennent plus sélectifs dans leurs allocations», a déclaré Michael Brandmeyer. «Ils investissent auprès de GPs qui reviennent aux fondamentaux de la création de valeur, utilisent moins l’effet de levier et investissent dans des actifs qui peuvent générer de la valeur grâce à une consolidation, à une efficacité opérationnelle et à de nouvelles sources de croissance afin d’améliorer la création de valeur à long terme.»

Les LPs interrogés estiment que les marchés actions (cotés et non cotés) dans les secteurs corporate et de l’immobilier sont généralement chers. Plus de 72% sont d’accord pour le private equity et l’immobilier non coté, 54% pour les actions cotées et 41% pour l’immobilier coté. Toutefois, les LPs estiment majoritairement que les obligations cotées (72%) et la dette privée (59%) sont correctement évaluées.

«La conviction des LPs que les obligations et le crédit offrent une bonne valeur stimule l’intérêt pour la dette privée. Alors que les marchés traditionnels de la dette se rétractent et que les coûts du capital augmentent, les emprunteurs sont à la recherche de plus en plus de solutions de financement innovantes et sur-mesure», a déclaré James Reynolds, associé et co-responsable mondial de la dette privée chez Goldman Sachs Asset Management.


Faire face à des sorties de plus en plus rares


Bien que la majorité des GPs continue de privilégier les sorties complètes en vendant des actifs pour générer de la liquidité au cours de l’année à venir, de nombreux LPs préfèrent les sorties plus progressives plutôt que de chercher des solutions sur le marché secondaire. Au lieu de vendre (10%), davantage de LPs s’engagent en tant qu’investisseurs dans des fonds secondaires (45%). Cette situation pourrait changer si les décotes se réduisaient et si les LPs choisissaient de réduire leurs portefeuilles au cours de l’année à venir.

Les «Subscription lines» sont devenus courantes pour la gestion des liquidités, ainsi 72% des GPs prévoient de les utiliser au cours de l’année à venir. Pour générer de la liquidité intermittente, le «NAV-lending» et les formes de financement par actions privilégiées restent moins utilisés (16% chacun), mais sont envisagés. La plupart des GPs continuent de penser que les sorties complètes par le biais de ventes d’actifs sont le meilleur moyen de générer de la liquidité au cours de l’année à venir.

Avec le ralentissement des transactions après la faible activité de fusions-acquisitions de 2022, les GPs sont les plus susceptibles de réévaluer leurs positions sur la base de la valeur des transactions des marchés non cotés (44% évoquent un «impact important»), et par des changements dans les paramètres d’exploitation tels que le chiffre d’affaires (38%) et les marges d’EBITDA (25%). Les valorisations des marchés cotés auront probablement un «impact modéré», selon 56% des personnes interrogées.

Dans les cinq prochaines années, l’IA et la data science devraient, selon 33% des répondants, être les plus grands moteurs de l’évolution de l’investissement alternatif; viennent ensuite un accès plus large au retail (20%) et l’évolution du cycle économique (16%).


Le progrès vers les objectifs d’investissement durable

Bien que 75% des investisseurs considèrent le développement durable comme une priorité, 43% des GPs ont accompli de réels progrès pour atteindre leurs objectifs d’investissement durable. Seuls 18% des LPs sont du même avis. De plus, les capacités des GPs en matière de développement durable sont perçues favorablement, mais les LPs sont moins confiants dans leur capacité à les évaluer. Parmi les LPs, 28% n’ont pas d’objectifs d’investissement durable, la plupart d’entre eux étant basés aux États-Unis.

Au niveau sectoriel, les GPs reflètent cette tendance dans leurs préférences d’investissement, en se concentrant davantage sur les investissements dans les énergies renouvelables (21%) par rapport à l’année dernière.

Les attentes des LPs par rapport à celles des GPs

Comme indiqué précédemment, les LPs souhaitent avoir des relations plus approfondies avec leurs GPs et tendent à avoir moins d’engagements (36% des répondants) et à porter plus d’attention à leurs relations existantes (32%). Alors que 23% des LPs réduisent significativement leur déploiement, seuls 4% le suspendent.

Pour évaluer les performances, les LPs continuent de privilégier le taux de rendement interne (TRI) et le multiple du capital investi (MOIC) par rapport aux mesures plus sophistiquées telles que la méthode méthode PME (Public Market Equivalent).

Compte tenu du ralentissement des engagements, 66% des GPs placent la levée de fonds parmi leurs trois principaux défis non liés à l’investissement. 68% des GPs sont en cours de levée de fonds ou prévoient de lever des fonds au cours des 12 prochains mois. Les GPs s’attendent à des délais de levée de fonds plus longs que par le passé (36% l’affirment contre seulement 6% qui évoquent des délais plus courts), mais 56% s’attendent toujours à lever plus de capitaux cette fois-ci.

Lors de l’évaluation des gérants, le facteur le plus cité par les LPs est le «track record» (51%), suivi par l’expertise opérationnelle (48%) et les frais/conditions (46%). Les GPs estiment que l’expertise sectorielle (69%), le «track record» (66%) et un sourcing différencié (63%) sont les facteurs qui les distinguent le mieux de leurs concurrents.

Pour capitaliser sur les opportunités, les deux sont confrontés à des défis pour trouver des capacités opérationnelles (53% des GPs, 42% des LPs), développer et maintenir une «culture d’équipe» résiliente (50% des GPs, 31% des LPs), retenir les talents et motiver les équipes (28% des GPs, 36% des LPs) et recruter des talents (28% chacun).

«Les marchés non cotés se sont développés à un rythme extraordinaire, à la faveur de nombreux GPs et LPs», conclut Michael Brandmeyer. «La volatilité et l’incertitude peuvent avoir un impact sur la levée de fonds et la croissance, mais la plupart des LPs indiquent qu’ils vont continuer d’allouer au non-coté et qu’ils cherchent s’y exposer plus via de nombreuses stratégies. Une meilleure visibilité en ce qui concerne les taux d’intérêt et tendances macroéconomiques pourrait développer la confiance dans les valorisations et améliorer la liquidité. Alors que la plupart sont déjà de plus en plus optimistes, cela donnerait aux GPs et aux LPs une plus grande flexibilité pour poursuivre de nouvelles opportunités et avoir recours à de nouvelles solutions.»

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