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L’ESG en mauvaise passe

L’ESG vit actuellement une période de stress test inédite

Performances décevantes, ORPEA, bonnes performances des secteurs liés à l’énergie, Russie, et pour couronner le tout, des flux nettement moins bons vers les produits estampillés ESG… il n’en fallait pas davantage pour voir les détracteurs habituels de l’ESG reprendre leur ritournelle sur l’inutilité de l’ESG.

Il faut reconnaître que la période actuelle offre de nombreux angles d’attaque et souligne les fragilités de l’approche un peu naïve avec laquelle beaucoup d’acteurs financiers présentent l’ESG.

Pendant plusieurs mois, les fonds ESG ont affiché des performances supérieures à celles de leurs indices de référence. Il n’en fallait pas davantage pour enclencher une communication sur la surperformance avérée des investissements ESG. Funeste erreur qui mettra du temps à être réparée.

La plupart des fonds ESG avaient dans leurs allocations un biais « croissance » avec des sous-investissements massifs dans des secteurs cycliques et surtout l’énergie. Ce biais a été sévèrement sanctionné par la hausse des taux à partir de l’été 2021.

Beaucoup de fonds ESG ont souffert depuis cette période : performances sous pression, communication plus difficile et commercialisation forcément plus délicate… La martingale espérée s’est évanouie.

Le scandale ORPEA est venu jeter un doute sur la fiabilité des notations et la guerre menée par la Russie en Ukraine a fait ressortir les contradictions éthiques de beaucoup d’acteurs. Comment justifier l’investissement dans des entreprises détenues par des oligarques d’un pays ne respectant manifestement pas les règles fondamentales de la démocratie.

Enfin, sans rentrer dans tous les détails des raisons de l’inflation, l’augmentation des prix des matières premières a propulsé à la hausse les cours de valeurs n’ayant pas grand-chose de « vert ».

Pour compléter ce tableau très noir pour l’ESG : les gouvernements européens, pour faire face à des pénuries annoncées d’énergie, ont mis de côté leur ambition climat au moins pour quelques mois.

Enfin, comme le démontrent régulièrement les ONG ou les think tanks engagés sur le climat, les grandes banques, les entreprises importantes ou les grands asset managers ne sont pas cohérents en réalité entre ce qu’ils affichent et ce qu’ils font.

Les cyniques ont donc trouvé confirmation à ce qu’ils dénoncent : l’ESG ne serait selon eux qu’une gigantesque opération marketing. Ce sont les mêmes qui répètent à longueur de temps que la transition énergétique va couter cher, qu’il faut prendre son temps, que l’on ne peut pas se passer du pétrole, du gaz (en particulier russe)… in fine, c’est dans ce groupe que l’on retrouve nos bons vieux climatosceptiques.

Bien essayé, mais totalement à côté de la plaque.

Plusieurs éléments sont à garder à l’esprit dans la période actuelle.

  • Le GIEC le confirme à chaque publication : le réchauffement climatique est enclenché, ses conséquences vont être de plus en plus graves. Cela ne s’inverse pas, bien au contraire.
  • Certains investissements sont de ce fait de plus en plus risqués.
  • Les entreprises, les banques ou les asset managers qui nient tout cela ou qui ne prennent pas les mesures nécessaires dès aujourd’hui ont un risque de durabilité maximum. En clair, ils sont en risque de disparition à plus ou moins long terme.

Si on revient à l’épargne, il est probablement nécessaire de s’appuyer sur ce qui s’est passé récemment pour faire évoluer l’approche de l’investissement durable. L’ESG n’est finalement que la méthode d’évaluation.

Tout d’abord, il faut rappeler que la finance durable n’octroie pas de brevet de moralité et n’est pas l’endroit où est déterminé ce qui est « bien » ou « mal ». Pour éviter ce malentendu, les acteurs financiers doivent rappeler l’objectif initial de leur fonds ou de leurs investissements et être totalement transparents. En particulier, ils ne doivent pas laisser espérer des résultats manifestement inatteignables que ce soit sur les performances financières ou sur la transition énergétique…

Si les objectifs, certes plus modestes que de vouloir changer le monde, sont clairs et suivis dans le temps, il est probable que la confiance sera plus facile à établir et à consolider dans le temps.

Dans ce contexte, l’investissement durable pourrait évoluer selon deux axes :

  • Pour ceux qui cherchent des investissements diversifiés, les fonds durables vont viser à éviter les acteurs les plus risqués en intégrant les risques extra-financiers. Pour ceux qui investissent sur le monde par exemple, il faut avoir à l’esprit que le fonds peut être présent dans des pays peu démocratiques ou sur des valeurs liées à l’énergie… Le seul, mais c’est déjà un énorme travail, objectif du gérant sera d’éviter l’investissement dans des acteurs notoirement risqués sur le plan extra-financier.
  • Deuxième axe : investir dans des secteurs ou des acteurs « durables », c’est-à-dire dans des entreprises qui ne sont pas en risque de viabilité dans le contexte que nous allons traverser ou qui aident les autres acteurs économiques à passer la période de transition.

Dans le premier cas, le portefeuille a un objectif de meilleur couple performance-risque que celui d’un investissement classique, mais il ne faut pas survendre l’objectif, qui à court terme sera modéré. Dans le deuxième cas, l’objectif sera de passer la période de transition, mais l’écart avec un investissement classique pourra être significatif à court terme.

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